Mes spectacles visent à faire réfléchir à ce qu’est l’état de suspension, que j’appréhende comme une métaphore de la vie : la constante recherche d’équilibre, la peur étant davantage là pour nous guider que pour nous empêcher.

Artiste et circassienne

Originaire de Finlande, Corinne Linder commence le cirque dès l’âge de sept ans et s’initie rapidement à différentes disciplines aériennes : équilibre sur les mains, jeux icariens, acrobaties au sol, corde verticale, soie, etc. Elle débute alors une carrière de circassienne-interprète en participant à de nombreux spectacles de cabaret en Finlande, ainsi que dans des festivals en France, comme à Avignon ou au Circa (Auch), et à l’international. Finaliste des championnats américains d’aérien sur soie en 2015, elle est cependant victime d’une chute qui va profondément bouleverser son parcours. À la suite de cet accident, Corinne Linder décide de se consacrer à la direction artistique. Après des études à Toulouse, elle y installe sa compagnie Fheel Concepts, qui expérimente les liens entre arts du cirque et arts numériques. Ses premiers spectacles, Hold On et The Ordinary Circus Girl connaissent rapidement un large succès. 

Suspendus à un fil

Après son accident, Corinne Linder travaille à New York auprès de l’artiste Emilie Baltz, et découvre la réalité virtuelle. Elle rencontre également Amaury Laburthe, avec lequel elle réalisera plusieurs projets en lien avec les technologies numériques. En 2019, Corinne Linder conçoit ainsi deux spectacles où la question de l’acrobatie et de la suspension dans le vide sont abordés à travers une expérience immersive : Hold On et The Ordinary Circus Girl. Le spectateur s’y retrouve plongé dans le quotidien d’une compagnie circassienne, au sein d’un dispositif où alternent utilisation des casques et spectacle de cordes. « Je voulais explorer », explique Corinne Linder, « la frontière entre le spectacle vivant, qui est très chaleureux, et la froideur propre aux espaces numériques ». Ces deux spectacles ont donc nécessité le développement de films en réalité virtuelle, et un travail très spécifique sur le son, qui permet de ressentir au plus près les émotions et les sensations des acrobates. Le résultat : des expériences participatives qui permettent au public de mieux comprendre ces disciplines, qui fascinent depuis toujours les amateurs de cirque. 

Une expérience intime

Les créations de Corinne Linder abordent la question du vide et de la chute, la possibilité d’un accident composant une part centrale du parcours de tout voltigeur. Pour cela, elle s’est basée sur sa propre expérience, mais aussi sur un ensemble de technologies, notamment sonores, qui permettent de faire ressentir aux spectateurs le poids ou la suspension. Hold On repose ainsi sur la tentative de capter la fragilité de chaque instant, le moment de bascule entre le vol et la chute : le spectacle a déjà été montré plus de quarante fois depuis 2019, notamment dans des festivals. Cette approche très intime du cirque, qui repose sur des sessions limitées à chaque fois à une dizaine de personnes, se retrouve également dans The Ordinary Circus Girl, où l’on accompagne la narratrice Anna à travers son parcours dans les airs.