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Comme la mer, mon amour, une création théâtrale d’Abdellah Taïa et Boutaïna El Fekkak
Dans la pièce de théâtre autobiographique Comme la mer, mon amour, l’écrivain Abdellah Taïa et la comédienne Boutaïna El Fekkak reviennent ensemble sur une amitié ancienne, née à l’époque de leur arrivée en France.
Des mots à la scène
Comme la mer, mon amour naît de la rencontre entre un écrivain et réalisateur, Abdellah Taïa, et une comédienne, Boutaïna El Fekkak. Le premier a grandi dans les quartiers populaires de Salé, au Maroc, avant qu’une bourse lui permette d’entreprendre des études de littérature à Paris, où il soutient un doctorat sur les romanciers libertins. Après plusieurs recueils de nouvelles et récits, il publie au Seuil L’Armée du Salut en 2006, un roman autobiographique qu’il adapte lui-même au cinéma en 2014. S'ensuivent de nombreux romans, dont Le Jour du roi (2010), pour lequel il reçoit le prix de Flore. Boutaïna El Fekkak, née à Rabat, est diplômée du TNS en 2007. Elle a joué dans de nombreuses pièces auprès de metteurs en scène comme Stéphane Braunschweig ou Caroline Guiela Nguyen.
Une histoire vraie
Comme la mer, mon amour est une histoire vraie qui part de la rencontre entre Abdellah Taïa et Boutaïna El Fekkak à Paris, au début des années 2000. Les deux jeunes immigrés sont issus de milieux sociaux différents : il est homosexuel et vient d’un quartier pauvre, elle est issue de la bourgeoisie. Confrontés aux mêmes difficultés et à une même forme de déclassement, une amitié-amour naît, qui sera cependant brutalement interrompue sans explication par Boutaïna El Fekkak. Vingt ans plus tard, Comme la mer, mon amour se présente comme un dialogue entre ces deux amis qui se retrouvent par hasard. Puisqu’elle refuse de s’expliquer sur les raisons de cette rupture, Abdellah en passe par le prisme du cinéma égyptien, un héritage et une passion qu’ils partagent, pour essayer de redécouvrir Boutaïna.
Écriture de plateau
Fruit d’une rencontre fortuite lors d’une conférence en 2013, entre deux amis qui s’étaient définitivement perdus de vue, Comme la mer, mon amour a été écrit en collaboration par Abdellah Taïa et Boutaïna El Fekkak, qui incarnent sur scène leur propre rôle. L’idée de la pièce a germé dans la rue de Paris, à la suite d’une représentation de Bérénice, incarnée par Isabelle Adjani, à laquelle les deux amis ont assisté ensemble. Puisqu’il leur est difficile d’évoquer les raisons de leur séparation dans la vraie vie, ils décident d’en passer par la scène : c’est le début d’un long processus d’écriture de plateau, où c’est à partir d’improvisations que naîtra un texte signé à quatre mains.
D’autres imaginaires
Comme la mer, mon amour aborde en toile de fond deux destins migratoires qui se recoupent. Pour les deux personnages, l’arrivée en France représente à la fois une occasion de s’émanciper et d'entamer des parcours artistiques, mais aussi la découverte du racisme. On comprend aussi comment les citoyens d’anciens pays colonisés peuvent se retrouver enfermés dans l’imaginaire et les codes de leur ancienne puissance coloniale. Dans cette pièce créée et jouée en français et en arabe marocain, c’est donc le cinéma égyptien qui incarne un autre modèle possible, et qui permet aux personnages de se reconnecter avec leur vécu et leurs origines marocaines.
Comme la mer, mon amour, d’Abdellah Taïa et Boutaïna El Fekkak, a bénéficié du soutien du dispositif Des Mots à la Scène de l'Institut français. Ce dispositif vise à valoriser les auteurs du Sud peu connus ou joués en favorisant la production de nouvelles mises en scène.