2 min
Freda, de Gessica Généus
Avec Freda, Gessica Généus rend hommage à la jeunesse haïtienne en dépeignant un portrait féminin complexe. Présenté au Festival de Cannes, le film permet d’apporter un regard sur les enjeux d’un pays toujours paralysé par le séisme de 2010.
Activiste et réalisatrice
Née en 1985 à Port-au-Prince, Gessica Geneus s’est fait très tôt une place dans le cinéma haïtien. À seulement 17 ans, elle décroche son premier rôle dans Barikad (2002). L’accueil chaleureux du public et des critiques la rendent immédiatement populaire. Malgré sa grande notoriété, elle travaille comme traductrice pour les Nations-Unies puis obtient une bourse pour terminer sa formation à l’Acting International de Paris. De retour dans son pays, l’actrice passe de l'autre côté de la caméra avec Nos visages (2012), une série de courts-métrages mettant en lumière les grandes personnalités de sa société haïtienne avant de s’intéresser au vaudou dans son premier documentaire, Le jour se lèvera (2017). Artiste pluridisciplinaire, Gessica Geneus a également écrit un livre Yon ti koze ak sè m (2016) et sorti un album, ASE (2018). Mais en 2021, elle est révélée au grand public en présentant Freda, son premier long-métrage de fiction au festival de Cannes dans la section Un Certain regard.
Le chaos haïtien
Avec Freda, Gessica Geneus suit le quotidien d’une jeune héroïne partagée entre ses cours et son travail dans la boutique familiale. Avec ses amies Jeannette et Esther, elle est tiraillée entre son envie de quitter son petit quartier populaire de Port-au-Prince, où règne la violence, et son envie de rester pour affronter les dérives de la société. Noyé dans la corruption et un passé colonial pesant, le pays apparaît condamné et chaotique. La cinéaste étudie la condition des femmes qui n’ont pas la possibilité de se projeter, entre manifestations, pneus qui brûlent, tirs dans la rue et critères de beauté dominants des sociétés occidentales.
Une archive de Port-au-Prince
Tourné en langue créole et à Port-au-Prince en 2020 en pleine crise sanitaire, Freda est une archive poignante du quotidien à Haïti. Avec ce film, la cinéaste Gessica Généus souhaitait montrer comment le quotidien des gens est influencé par des décisions de membres du gouvernement. Avec cette fiction presque documentaire, elle illustre une jeunesse handicapée et pointe notamment les obstacles que rencontrent les femmes dans cette société, encore meurtrie par le séisme tragique de 2010.
Un triste écho à l’actualité
En juillet 2021, au moment de la projection du film au Festival de Cannes, à la Semaine de la Critique, le président haïtien Jovenel Moïse est assassiné. C’est un hasard du calendrier qui donne à Freda une résonance particulière en soulignant le chaos qui règne dans le pays. Pendant la compétition, le film a reçu la mention spéciale Découverte du Prix François-Chalais et a permis aux haïtiens de rayonner à l’international, loin des tracas politiques.
Freda a été soutenu en 2020 dans le cadre de l’Aide aux cinémas du monde. Ce programme de l’Institut français apporte son soutien à des cinéastes étrangers sur des projets de films en coproduction avec la France, qu’il s’agisse de longs métrages de fiction, d’animation ou de documentaires de création.