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Sucre noir, de Miguel Bonnefoy
Du rhum, des pirates, des belles femmes, le deuxième roman de Miguel Bonnefoy carbure surtout à l'or de la poésie et de son amour pour le Venezuela, dont ce conte est aussi un émouvant portrait.
Miguel Bonnefoy
Né en 1986 à Paris d'une mère vénézuélienne et d'un père chilien, ce fils de diplomate a suivi sa scolarité dans les lycées français des pays où l’emmenaient ses parents, notamment au Portugal et au Venezuela.
À sa majorité, Miguel Bonnefoy s'installe à Paris et s’inscrit à la Sorbonne pour étudier la littérature française, notamment Romain Gary et Aragon, avant de débuter sa carrière d’écrivain. Il la nourrit de multiples expériences : ouvrier, professeur de français à l’Alliance française de Caracas et producteur d’évènements culturels, libraire en Argentine, veilleur de nuit dans un hôtel parisien, bouquiniste sur les quais de Seine...
Son premier roman, Le Voyage d’Octavio (2015), est finaliste du Prix Goncourt du Premier Roman et obtient le Prix de la vocation et la mention spéciale du jury au Prix des cinq continents.
Canne à sucre et or noir
Avec Sucre Noir (2017), Miguel Bonnefoy nous transporte sur une île des Caraïbes, où la légende d’un trésor disparu vient bouleverser l’existence d’une famille de maîtres rhumiers, les Otero. L’héritière de la plantation de canne à sucre, la romanesque Serena, croise la route de l’ambitieux explorateur Severo Bracamonte, chacun cherchant le trésor qui donnera sens à leur vie.
Ironie du sort, l’or se trouve souvent sous les yeux de celui qui le cherche, plutôt que caché dans les profondeurs de la terre. Chasse au trésor ou allégorie de la course au pétrole vénézuélien ? Ce récit de pirates est un véritable conte philosophique.
Une écriture romanesque
Sucre Noir s'ouvre sur le récit du naufrage du célèbre pirate Henry Morgan, qui a eu lieu quelque trois cent ans avant l'intrigue principale. C'était le sujet d'une nouvelle que Miguel Bonnefoy avait écrite lorsqu'il était étudiant à La Sorbonne. Ce texte, resté dans un tiroir plusieurs années, sert finalement d’incipit picaresque et hypnotique au roman.
On y découvre notamment trois personnages féminins, construits en fonction de l'évolution de la condition féminine au XXe siècle : Candelaria Otero n'a d'existence qu’à travers celle de son mari ; la seconde, Serena Otero, est une mondaine qui se plaît dans la sphère familiale tout en cultivant sa curiosité, tandis que la troisième, Eva Fuego, est une femme de caractère qui sait s'imposer dans sa communauté et repousse les galants.
Les trésors des Caraïbes
Si le prologue hypnotique de Sucre Noir semble nous projeter dans un cauchemar exotique, ce récit familial déploie un réalisme magique, proche de celui de Gabriel García Márquez, qui invite le fantastique dans le quotidien.
Allégorie de l’histoire du Venezuela, où le pétrole a longtemps été une rente avant de s’épuiser, le roman expose aussi toutes les autres richesses des Caraïbes, de la canne à sucre à la mangue ou au café, ainsi que les traditions et les savoir-faire de ses habitants.
Par cette évocation pleine d'espoir, Miguel Bonnefoy dit vouloir offrir une preuve de la vitalité de la culture latino-américaine.

Lauréat du programme Stendhal de l'Institut français, Miguel Bonnefoy a séjourné au Venezuela, à Caracas, en mars et avril 2016.
Le programme Stendhal permet à des auteurs français ou résidant en France de partir dans un pays étranger travailler à un projet d’écriture en lien avec le pays.