Désiré Koussawo organise la compétition Sahel Esports champions (Novembre Numérique 2022)
Acteur majeur de la structuration de l’esport en France et à l’étranger, notamment en Afrique, Désiré Koussawo est président de France Esports et SAGES - Services for Africa Gaming & Esports.
A l’occasion de l’édition 2022 de Novembre Numérique, coordonnée par l’Institut français dans le monde entier et avec l’appui du fonds de mobilité Culture au Sahel, SAGES organise une compétition esport régionale dans la zone Sahel - Sahel Esports champions - en partenariat avec des structures esports de chaque pays. Après des phases de qualifications au Tchad, au Niger, au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal dans les établissements du réseau culturel français ou des lieux partenaires, les meilleurs joueurs et les meilleures joueuses s’affronteront lors d’une grande finale à Dakar le 23 novembre prochain.
Mis à jour le 03/11/2022
5 min

Quel a été votre parcours jusqu’à devenir une figure incontournable de l’esport en France, mais aussi en Afrique ?
J’ai découvert l’esport tout à fait par hasard en l’an 2000. J’étais président d’un club d’informatique et j’ai accueilli des jeunes qui souhaitaient utiliser la salle pour organiser une compétition de jeu vidéo. La même année, nous avons créé l’association FuturoLAN, qui organise aujourd’hui la Gamers Assembly à Poitiers, le plus grand événement d’esport en France, avec près de 2500 joueurs, 25.000 visiteurs et 4000 bénévoles. C’est très vite devenu pour moi une passion : en 2014, j’ai rejoint la société ESL, le plus grand organisateur esport au monde, dont j’ai géré le développement pour la France. Depuis 2021, je me suis investi en tant qu’indépendant pour accompagner entreprises et institutions dans leur développement de l’esport. A ce titre, je réalise des missions en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. J’essaye ainsi de diffuser l’idée que l’esport n’est pas qu’un loisir, mais peut aussi devenir une pratique structurante pour accompagner les jeunes.
Qu’est-ce que l’esport ? Comment peut-on définir cette discipline ?
Il faudrait d’abord commencer par dire que l’esport n’est pas un sport. C’est plutôt la pratique compétitive du jeu vidéo entre deux acteurs ou deux groupes d’acteurs. Une simple partie de Mario Kart à deux est donc déjà une forme d’esport. Certains jeux, comme League of Legends ou Counter Strikes, contribuent très fortement au développement de l'esport et sont capables de remplir de grandes salles. Selon moi, on bascule ainsi vraiment dans la catégorie de l’esport quand on a plus de personnes qui regardent les parties que de personnes qui jouent elles-mêmes. Comme le football, qui est regardé par beaucoup de personnes qui ne le pratiquent pas.
Vous êtes président de France Esports et SAGES. Pourriez-vous présenter ces deux structures et leurs missions ?
A l’occasion de mon parcours de près de 20 ans dans le milieu du esport, j’ai exercé aussi bien dans le milieu associatif que professionnel, en France et à l’international. Cette expérience a convaincu mes pairs de me confier la présidence de France Esports, une association qui fédère l’ensemble des acteurs de cette filière : les éditeurs, les promoteurs et les clubs associatifs. L’objectif de cette structure est de soutenir la structuration de l’esport et de sensibiliser aux opportunités qui entourent cette filière, à la fois en termes de métiers et de développement économique. Dans les pays en développement également, notamment en Afrique, l’esport peut favoriser un virage technologique pour beaucoup d’acteurs. C’est à ce titre que j’ai créé SAGES, une structure basée sur le continent africain, qui rassemble un réseau de partenaires et d’amis dans de nombreux pays. Le but étant de leur apporter une forme d’accompagnement, notamment dans leur dialogue avec les grands acteurs internationaux. Depuis deux ans, cette initiative fonctionne comme en témoigne notre collaboration actuelle avec l’Institut français, qui nous a permis de lancer le projet Sahel Esports Champions.

Les compétitions esports rencontrent un succès spectaculaire et représentent tout un secteur économique et culturel en pleine croissance depuis quelques années. Comment l’expliquez-vous ?
Aujourd’hui, l’esport est de plus en plus visible, car cette pratique touche de plus en plus de jeunes. Cette génération est née avec les écrans, la question est donc de savoir s’il faut lutter contre ce phénomène ou au contraire essayer de l’accompagner. Ces deux ou trois dernières années, il y a eu un déclic en ce sens, car l’esport remplit désormais les salles et les stades, ce qui n’était pas le cas avant. De grandes équipes comme Team Vitality, avec des joueurs internationaux qui font rêver les jeunes, réunissent des audiences similaires, voire supérieures, à celles que l’on a dans les grands médias traditionnels. L’esport est devenu le meilleur biais pour toucher facilement une vaste audience de jeunes. A partir du moment où une forte audience se crée, les marques et les politiques s’intéressent fortement à cette nouvelle pratique. Il faut donc bien sûr accompagner et réguler cette filière, comme nous essayons de le faire avec France Esports.
L’esport va faire son entrée au sein du programme olympique, à compter des Jeux Olympiques 2024. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
L’esport ne sera pas présent aux Jeux Olympiques en tant que discipline officielle à part entière. En revanche, depuis les deux dernières éditions, l’esport est invité en marge de cet événement, en partenariat avec le Comité International Olympique et le constructeur informatique Intel. Des compétitions sont organisées dans l’esprit des Jeux Olympiques, mais elle n’intègrent pas la programmation officielle. En 2024, l’esport ne sera pas présent pendant le mois de la compétition, mais pendant une autre compétition. Le format est encore en cours de réflexion. Il faut cependant rappeler une grande différence entre sport et esport : la question des ayants-droits. Chaque jeu vidéo appartient à une entité, c’est une propriété intellectuelle liée à un acteur privé. Il est donc difficile de parler de Jeux Olympiques en évacuant cette donnée.
Quels sont vos principaux projets pour les mois à venir ?
Depuis 2021, je développe des projets en freelance. J’accompagne donc la préparation de nombreux événements, comme l’Occitanie E-Sport à Montpellier, la Gamers Assembly à Poitiers, et d’autres encore. Mon autre grand projet est de développer la pratique de l’esport en Afrique, en rassemblant l’ensemble des acteurs locaux autour d’un projet commun. Il pourrait s’agir par exemple d’inventorier l’ensemble de structures, des initiatives et des joueurs, ne serait-ce que pour les rendre visibles. J’espère dans les prochains mois pouvoir mettre au point une plateforme qui y sera dédiée. J’interviens aussi sur de nombreux évènements internationaux, notamment en lien avec le réseau culturel français à l’étranger.
