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Rencontre

Éric Soulier présente la Villa Antipode

La Villa Antipode doit répondre, avant tout, à une logique d’échange et à la prise en compte de la réalité d’éloignement de la Nouvelle-Zélande.

Le Conseiller de coopération et d'action culturelle en Nouvelle-Zélande revient sur la création de la Villa Antipode, créé en 2024 avec le soutien de la Fabrique des Résidences. Nous discutons avec lui de ce nouveau réseau de résidences, de son fonctionnement ainsi que de son développement en 2025. 

Mis à jour le 20/03/2025

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Eric Soulier
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L’Ambassade de France en Nouvelle-Zélande a lancé en 2024 un nouveau réseau de résidences : la Villa Antipode. Pouvez-vous nous parler de ce projet ? 

Nous avons un historique de résidences en Nouvelle-Zélande dont la plus ancienne est celle de Randell Cottage, consacrée à l’écriture et créée il y a vingt-trois ans. Les autres ont été imaginées au fil des années : deux d’entre elles ont dix ans d’existence et la petite dernière a trois ans. Le projet vient également de la réalité du pays, situé à 18 000 kilomètres de la France : la Nouvelle-Zélande n’est pas un pays où l’on passe par hasard, c’est une destination. Cette réalité a un effet sur la capacité à générer des projets culturels et les programmes de résidences permettent de répondre à cet éloignement en leur donnant un nouvel élan. Notre inspiration vient des États-Unis et de la Villa Albertine, dont nous avons adapté le concept, qui est basé sur une multiplicité d’endroits et de formes artistiques. 

 

Qu’est-ce qui fait la spécificité de la Villa Antipode ? 

La spécificité de la Villa Antipode vient de sa multiculturalité, de sa diversité. Nous avons la résidence Randell Cottage, centrée autour de l’écriture, où un écrivain peut venir pendant une durée déterminée, pouvant aller jusqu’à six mois. Il y a également une résidence à Auckland, liée à la rencontre entre arts et numérique, puis une autre à Wellington, qui s’intéresse plus largement au monde artistique. Enfin, la petite dernière, à Wellington également, a été ajoutée il y a trois ans afin de valoriser une particularité de la ville qui est d’être l’antichambre d’Hollywood pour les effets spéciaux et le numérique grâce à Peter Jackson et ses studios. Cette activité est majeure, avec plus de 1500 employés et des dizaines de studios indépendants pour une ville de 200 000 habitants comme Wellington. Nous avons pu mettre en place, avec l’université Victoria, cette dernière résidence – CAM (Cinematic Arts Miramar – du nom du quartier où se trouvent les studios Weta) tournée exclusivement vers le cinéma, l’animation, les effets spéciaux. C’est aussi une première dans le Pacifique, un endroit où peu de programmes de résidences sont proposés. 

L’interaction avec la communauté locale est un aspect important de ces résidences.

Dans le cadre de ce programme, combien d’artistes allez-vous accueillir par an et dans quelles disciplines ? 

Chaque année, nous accueillons quatre artistes, soit un par résidence, sur des durées différentes. La plus longue d’entre elles est de six mois, les autres de deux mois. Pour chacune des résidences, il existe un comité de sélection : la ligne directrice est de proposer un projet qui possède un lien avec la Nouvelle-Zélande. Ils doivent entrer dans une logique d’intérêt par rapport au lieu et à la manière dont ils vont pouvoir être accompagnés localement. Il n’y a pas d’obligation à faire une exposition ou à montrer quoi que ce soit, l’essentiel est de parler de son travail, d’échanger et de créer avec les artistes locaux. L’interaction avec la communauté locale est un aspect important de ces résidences. Si quelque chose est montrable, c’est bien sûr important pour la communication du programme, mais il n’y a aucune pression. 

 

Quatre résidences partenaires, Randell Cottage, Te Ataata, Te Whare Hēra et Cinematic Arts Miramar, sont d’actualité. Quelles sont les spécificités de chacune d’entre elles ? 

Dans notre communication, nous évoquons le terme de Villa Antipode, mais chacune des résidences possède ses spécificités, qu’elles soient thématiques, de lieu ou de temps. Elles ne sont pas toutes ouvertes au même moment de l’année, cela donne plus de possibilités aux artistes en fonction de leur calendrier. Pour les deux résidences liées au monde de l’art, il existe deux fenêtres de possibilité : en fonction du travail de l’artiste, il peut être plus pertinent d’être à Auckland, ou à Wellington en termes d’objectifs de travail. Pour les deux autres résidences, les choses sont plus définies : l’une est sur le cinéma, l’autre est une résidence d’écriture. Le but de la Villa Antipode est de rationaliser nos pratiques, d’avoir les mêmes méthodologies et de suivre une même approche dans chacune de ces résidences. Cela permet d’avoir une communication qui puisse se faire en une seule fois afin de donner ainsi une plus grande visibilité, aussi bien au niveau de l’appel à candidatures qu’ensuite aux artistes sélectionnés. Cela permet aussi de s’inscrire dans une logique mondiale et de créer, nous l’espérons à moyen terme, des synergies avec les programmes de villas du monde entier. 

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Les infrastructures et les réseaux des universités partenaires alliés aux sept Alliances Françaises du pays permettent une immersion dans la société néo-zélandaise. Comment se déroulent ces relations avec la France ? 

Pour la résidence d’écriture, il s’agit vraiment d’avoir un lieu au calme et du temps. Nous aidons le résident à rencontrer le monde littéraire néo-zélandais. Les universités ont beaucoup de moyens et ouvrent complètement leurs portes à chacun de nos résidents. À chaque fois, nous sommes bluffés, car ils ont accès à beaucoup de ressources et d’infrastructures. C’est pour cette raison que la partie sélection est importante puisque l’on fait en sorte que la personne choisie puisse être accueillie dans l’université en question pour un sujet qui l’intéresse face à des interlocuteurs en capacité de l’accompagner. Dans les projets traités, il y a un rapport à la culture Maori, une culture de l’oral, très codifiée, et nous n’avons évidemment pas le droit d’utiliser des éléments qui lui appartiennent sans y être autorisé. Ceci étant dit tout est possible car au sein de chaque université des professeurs spécialisés font en sorte qu’aucune erreur ne soit commise dans le processus. Quand on est intéressé par cette culture, ce travail fait partie d’une logique d’échange et de la réalité du territoire: c’est un vrai plus dans la compréhension de ce qu’est le monde qui nous entoure et la vision que d’autres cultures peuvent en avoir. 

 

Quel bilan faites-vous pour cette première année de la Villa Antipode ? 

Cette première année, nous nous sommes interrogés sur la communication et en priorité  quel nom donner à notre Villa. Le premier choix de nom, l’équivalent maori de Nouvelle-Zélande, Aotearoa, était adapté au pays, mais inadapté à la logique d’une visibilité internationale. Nous avons ensuite songé à Villa Antipode, qui marche bien car, en anglais, c’est à peu près la même chose, et, en France, cela fonctionne tout de suite. En plus, le Petit Robert lui-même illustre sa définition d’antipode avec la phrase « La Nouvelle-Zélande est l’antipode de la France. » En termes de visibilité et de compréhension, cela marche, mais on doit voir à l’usage sur la durée. Les acteurs culturels commencent également à faire le lien avec les résidences, mais beaucoup reste encore à faire. La priorité est de développer une stratégie de communication cohérente pour mettre en avant l’excellent travail de nos partenaires. La première étape avec la création du nom et du logo nous donne une signature visuelle forte et grâce au financement de la Fabrique des résidences nous avons pu faire appel à une graphiste, Claire Wastiaux. 

 

Comment envisagez-vous le développement de la Villa en 2025 et durant les prochaines années ? 

Il est essentiel de pérenniser la partie administrative et plus largement la structuration de la Villa Antipode avec nos partenaires. Là aussi nous avons bénéficié de l’accompagnement de l’Institut français, grâce à la participation de Noémie Clarke à la formation « conception et développement de résidences d’artistes ». Nos discussions portent, notamment, sur une structuration dans un format de Fondation. Il nous faudra aussi continuer à communiquer pour donner plus de visibilité en France à la Villa Antipode et aux artistes qui sont passés dans ces différentes résidences. De cette façon, ils pourront être d’anciens résidents de la Villa Antipode et, en portant cette image, ils la renforceront. Lors d’un comité de sélection, une ex-résidente de la Villa Kujoyama était d’ailleurs particulièrement enthousiaste à l’idée d’être maintenant l’une des premières résidentes de la Villa Antipode. Ça lui plaisait beaucoup d’avoir cette continuité entre ces différents réseaux. Grâce à ces artistes, il va être possible de créer des liens plus institutionnels afin de donner pleinement corps à la Villa Antipode. 

L'Institut français soutient la Villa Antipode

La Villa Antipode bénéficie du soutien de la Fabrique des résidences de l'Institut français. La Fabrique des résidences s’adresse à tous les postes du réseau, Instituts français, Alliances Françaises et centres binationaux, quelle que soit leur géographie. Il a pour objectif d’accompagner le réseau culturel de la conception jusqu’à la mise en œuvre de nouveaux programmes de résidences pérennes, ou sur une phase d’évolution d’un programme existant. 

Depuis sa création en 2018 et à travers 6 éditions, La Fabrique des résidences a permis de développer 40 programmes de résidences dans 29 pays et a ainsi offert l’opportunité à plus de 150 artistes d’en bénéficier. 

En savoir plus 

L'institut français, LAB