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Gordon

J’ai la chance de faire un métier multiple, et d’expérimenter autour de technologies en devenir. Je m’amuse beaucoup, c’est un rêve d’enfant !

Réalisateur et directeur artistique, Gordon multiplie les programmes culturels en réalité virtuelle (VR) et en réalité augmentée (AR). Il a notamment conçu 1, 2, 3 Bruegel, un jeu en réalité virtuelle basé sur l'œuvre du maître flamand, Replay Memories, une création immersive qui interroge notre rapport à l’histoire, ou encore cette année Quand la Petite Danseuse sort de sa boîte co-produite par le Musée d’Orsay.

Mis à jour le 30/11/2021

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Gordon
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Vous avez commencé votre carrière dans le domaine de l’habillage graphique à la télévision. Comment en êtes-vous arrivé à la réalisation ?

Après mes études à l’école Estienne où je me suis formé à la mise en page et à la typographie, j’ai en effet travaillé dans le domaine de l’habillage pour la télévision. C’est un univers très particulier et contraignant, où l’efficacité est le maître mot. J’y ai appris une rigueur du montage, et j’ai eu l’occasion de me former à la réalisation à travers les tournages en studio ou en extérieur. Au bout de quinze ans, j'ai toutefois eu le sentiment d’en avoir fait le tour, et j’ai ressenti l’envie de me rapprocher du monde de la culture et de la musique.

 

Vous avez réalisé de nombreux films où la musique (et le répertoire classique en particulier) tient une place centrale. D’où provient cette appétence particulière ?

Je suis mélomane, la musique m’accompagne depuis toujours. Travailler dans le musical était donc un rêve. L’habillage en télévision demande de travailler aussi le sound design, c’est donc assez naturellement que j’ai pu faire cette transition. C’est aussi le fruit du hasard des rencontres et des d’amitiés. Jean-Stéphane Michaux, de Camera Lucida, était mon voisin, et nous travaillons ensemble depuis presque 20 ans. Avec François Morel et l’Orchestre National de France nous avons réalisé Pierre et le Loup pour France Télévisions. C’était un parfait mélange de mes univers : un monde où le livre s’anime et où la typographie se change en personnages.

 

Comment est née votre collaboration avec Andrès Jarach et le studio Lucid Realities, sur des projets comme Replay Memories et 1,2,3 Bruegel ?

Nous avons été présentés par Chloé Jarry, fondatrice et productrice du studio Lucid Realities. Elle souhaitait imaginer une expérience VR qui parle de notre mémoire collective au temps des algorithmes. Nous sommes très complémentaires avec Andrès et on ne se quitte plus : comme le disait Gilles Deleuze « avoir une idée, c'est une espèce de fête », et quand nous sommes ensemble, c’est la fête très souvent.

 

Dans Replay memories, qui fait appel à la VR, vous questionnez la mémoire collective à l'heure du web et des algorithmes. Quelles sont les origines de ce projet ? Comment mène-t-on un projet aussi ambitieux ?

Effectivement, c’était un projet très ambitieux, aussi bien d’un point de vue éditorial que technique. Nous souhaitions nous interroger sur la place des algorithmes dans nos vies, comment ils sont conçus et orientés. Nous avons axé Replay memories sur le 11 septembre 2001, un événement advenu alors qu’internet n’avait que dix ans d’existence. Comment l’histoire se construit-elle quand on externalise autant notre mémoire sur nos différents appareils connectés ? Et comment notre mémoire personnelle évolue-t-elle dans le temps alors qu’Internet joue un rôle d'entonnoir ? C’est un problème fascinant. L’expérience est actuellement présentée à la BNF jusqu’au 14 décembre 2021.

 

1,2,3 Bruegel a pour point de départ le tableau Les jeux d’enfants de Bruegel l’Ancien. Expliquez-nous d’où est venue cette idée ?

Ce projet a été réalisé dans le cadre de la collection Arte Trips, toujours en collaboration avec Lucid Realities. Le tableau représente près de deux cent enfants qui jouent sans adulte. L’utilisateur va enfiler le casque et pouvoir jouer avec eux à cache-cache : on compte jusqu’à 3… et paf! Ils ont tous disparu. Un aspect très important pour nous est cependant de respecter l’œuvre : nous ne voulions absolument pas animer les personnages et recréer des décors. Par le truchement de l’anamorphose nous avons transformé le tableau sans rien toucher au travail du peintre. Le tableau devient alors une maquette. 

1,2,3 BRUEGEL - Teaser
1,2,3 BRUEGEL - Teaser

Votre nouveau projet à sortir en octobre prochain, Quand la Petite Danseuse sort de sa boîte, est une collection d’expériences en réalité augmentée inspirée de la petite danseuse d’Edgar Degas et de chefs d’œuvre de la peinture. Pouvez-vous nous en dire plus ?

J’ai imaginé cette œuvre commandée par le Musée d’Orsay avec Marie Sellier : nous avions déjà collaboré par le passé. Nous nous sommes promenés ensemble dans le musée avec une contrainte en tête : ne pas faire déambuler des enfants dans le musée avec un téléphone. Nous voulions au contraire utiliser la force des dialogues, du son et de la musique pour raconter une histoire. L’expérience dure trente minutes, elle se fait à la maison, et consiste à suivre la Petite danseuse, à la rencontre d’œuvres plus ou moins connues disséminées dans le musée. Les enfants feront apparaître la Petite danseuse chez eux dans un petit musée en réalité virtuelle. L’application sortira à l’automne 2021 et sera téléchargeable gratuitement sur les stores.

 

Pensez-vous que les nouvelles technologies comme les réalités virtuelle et augmentée permettent de renouveler le regard sur les œuvres classiques, notamment auprès des publics jeunes ?

Absolument! La VR et l’AR créent des souvenirs. En utilisant les technologies dont les plus jeunes sont friands on arrive à les emmener vers d’autres univers comme l’opéra, la musique baroque, la littérature ou l’art contemporain.

 

L’architecture vous passionne également et vous venez d’initier une toute nouvelle collection d’œuvres en réalité virtuelle dédiée à l’architecture, encore en développement. Pouvez-vous nous présenter le premier épisode consacré à la Villa Savoye de Le Corbusier, sur lequel vous travaillez actuellement ?

Avec Chloé Jarry, la productrice du projet, nous sommes fascinés par Le Corbusier : enfant, elle a même habité la maison du Fada à Marseille. Le premier épisode de cette collection, « La villa Savoye », résume parfaitement notre volonté de montrer l’architecture à travers les yeux des créateurs. Nous sommes partis des cinq points de l’architecture nouvelle érigés par Le Corbusier et qui sont représentés parfaitement dans cette Villa : les pilotis, le plan libre, la façade libre, la fenêtre en bandeau et le toit terrasse. Nous racontons aussi le cahier des charges donné par la commanditaire, Madame Savoye, la femme d’un riche assureur du Nord de la France qui voulait une villa différente de celle de ses amis et équipée de tout le confort moderne.

 

En quoi le médium de la réalité virtuelle vous semble intéressant pour faire découvrir les grandes réalisations architecturales ?

Le travail sur la notion d’échelle me fascine depuis l’enfance. La VR permet de passer du concept au plan, à la maquette, puis au chantier, et enfin de découvrir l’entièreté de la réalisation en modifiant à chaque étape la taille et l’environnement de l’utilisateur. C’est extraordinaire pour éprouver les concepts architecturaux.

L'Institut français et l'artiste

Quand la Petite Danseuse sort de sa boîte, de Gordon, fait partie du guide de programmation Novembre Numérique 2021, qui propose une riche sélection de propositions de l’Institut français et de ses partenaires. 

Piloté par l'Institut français, Novembre Numérique est le mois des cultures numériques.

En savoir + sur Novembre numérique 

 

1,2,3 Bruegel,  de Gordon et Andrès Jarach, fait partie de Culture VR - la sélection, offre de contenus en réalité virtuelle destinés à la diffusion au sein des espaces du réseau culturel français à l'étranger ou de leurs partenaires. 

En savoir + sur Culture VR - la sélection 


 

L'institut français, LAB