de rencontres
Rencontre
Création numérique

Irvin Anneix nous présente la nouvelle saison de « Cher futur moi »

Les adolescents ont peu d’espace pour s’exprimer et on leur donne rarement la parole.

L’artiste vidéaste français Irvin Anneix réalise, selon ses propres mots, des projets pour donner « la parole à ceux qui ne l’ont pas dans les médias traditionnels ». Avec Cher futur moi il offre ainsi une tribune à des jeunes de 15 à 20 ans, invités à envoyer un message en vidéo à leur « futur moi » dans 10 ans. Pensée dans le cadre de la Saison France-Portugal 2022, la quatrième saison de la web-série a été réalisée par Ivrin Anneix, en collaboration avec Claudia Alves, avec des jeunes français et portugais. Les épisodes sont à découvrir sur la chaîne YouTube de Cher futur moi ainsi que sur Instagram

Mis à jour le 19/10/2022

5 min

Image
Irvin Anneix
Crédits
Irvin Anneix © William Meas

Depuis votre premier projets Mots d’ados, vous vous intéressez particulièrement à la jeunesse. D’où vient l’idée d’aborder sous différents angles les sujets qui touchent les jeunes ? 

Pour Mots d’ados, mon tout premier projet en tant qu’artiste, j’ai collecté des centaines de journaux intimes rédigés par des adolescents. Cette vaste collection à fait l’objet d’un livre, et d’une cabine de lecture qui permet à d’autres adolescents de lire, face caméra, les journaux intimes d’autres adolescents.

Le point de départ de cette vaste collection, c’était mon propre journal intime. Entre 15 et 18 ans, je fus envahi d’un mal-être autour de mon genre et de ma sexualité. Pendant cette période où la communication intime à l’oral était taboue, c’est grâce à la rédaction d’un journal intime et de plusieurs blogs anonymes que j'ai réussi à extérioriser mes maux, à formuler mes désirs inavouables dans la réalité. Ces écrits étaient thérapeutiques. Ils me permettaient d’arrêter le temps, d’être en contact avec mon intimité.

Cela m’a fait réaliser que les adolescents ont peu d’espace pour s’exprimer et qu’on leur donne rarement la parole. C’est ce que je tente de faire dans mes projets : j’invente des dispositifs dans lesquels ils se sentent à l’aise pour parler sans tabou de leurs rêves et de leurs peurs les plus intimes. Le résultat est édifiant et donne à voir une image nouvelle des adolescents, très loin des clichés. 

 

Vous avez imaginé la web-série documentaire Cher futur moi, qui invite des participants de 15 à 20 ans à envoyer une vidéo à leur futur moi dans 10 ans. Réalisée dans le cadre de la Saison France-Portugal 2022, la prochaine saison fait appel à de jeunes français et portugais. Avez-vous été marqué par un message en particulier ?  

Cher futur moi est né en 2016. Depuis, c’est presque 400 jeunes qui ont participé à l’aventure. La plupart sont francophones, habitent en France métropolitaine, dans les Territoires d'outre-mer, en Algérie, au Mali, en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire ou encore au Canada. Qu’on habite à Montréal, Porto, Kinshasa ou dans un petit village des Vosges, les participants ont des rêves communs : ils veulent être aimés, être heureux, avoir de l’argent, trouver du sens à la vie, voyager à travers le monde, s’affranchir du regard des autres ou encore vaincre leurs complexes… On retrouve des peurs communes également comme celles de l’échec, de la pauvreté ou encore de la mort d’un proche. 

Néanmoins, certains sujets émergent en fonction des réalités que vivent ces jeunes. Certains sont en pleine transition de genre, découvrent les joies des études supérieures, l’indépendance, un nouveau pays… D’autres souhaitent guérir d’une maladie, vaincre leurs addictions ou encore stopper le harcèlement dont ils sont victimes à l’école. 

Dans les capsules de cette nouvelle saison franco-portugaise, on retrouve de la même façon des réalités singulières. Plusieurs participants sont franco-portugais et espèrent s’emparer avec fierté de leurs origines dans le futur. Antoine vient par exemple de s’inscrire dans un cours de portugais et souhaite être complètement bilingue dans 10 ans. Emy souhaite quant à elle « raccorder le fil rompu » et apprendre le portugais à ses futurs enfants. Dans 10 ans, Asbel et Eliott espèrent avoir achevé leur transition de genre. Ils espèrent que les démarches médicales, sociales et administratives si contraignantes en France soient simplifiées dans le futur. La crise de la Covid-19 a beaucoup fragilisé la santé mentale des adolescents. Ils attendent beaucoup du futur. 

On retrouve chez presque tous les participants l’espoir d’une société plus féministe et plus inclusive avec les minorités. Une société résolument plus écologique également. Certains demandent à leur « futur moi » de devenir végan, de ne plus consommer de viande, de ne pas avoir d’enfant, de limiter sa consommation de ressources, ou encore de ne plus prendre l’avion. 

Cher Futur Moi #Mathilde
Cher Futur Moi #Mathilde

Comment s’est déroulée la collaboration avec vos partenaires français et portugais ? 

N’étant pas lusophone, j’ai réalisé cette saison franco-portugaise de Cher futur moi avec Cláudia Alves, une réalisatrice de films documentaires. Nous sommes tous les deux intervenus dans des classes, en France et au Portugal, afin de trouver les participants du projet. Nous avons été aidés par le Commissariat de la Saison et nous avons pu intervenir à Faro, Bragança, Macedo de Cavaleiros, Amadora ou encore au Lycée français de Porto. Nous avons également diffusé un appel à participation sur les réseaux sociaux qui a été relayé par l’Institut français et l’Instituto Camões. Au total, près de 60 jeunes ont participé à cette saison. 

Malgré le nombre important d’interlocuteurs, la collaboration s’est extrêmement bien déroulée. Nous avons toujours eu à faire à des personnes disponibles, intéressées et à l’écoute. Je remercie en particulier Amandine Canistro de l’Institut français (Chargée de projet "Spectacle vivant" de la Saison-France-Portugal 2022), qui a suivi le projet depuis ses débuts et a facilité tous nos échanges. 

 

Que retenez-vous de cette coopération franco-portugaise professionnellement et personnellement ? 

Depuis le début du projet, j’avais très envie de réaliser des capsules « non francophones » de Cher futur moi et je suis très content d’avoir pu le faire dans le cadre de la Saison France-Portugal 2022. Cela me donne envie de continuer et d’agrandir la collection à l’international !

Sur un plan plus personnel, je suis tombé sous le charme du Portugal que je ne connaissais pas. 

 

La Saison France-Portugal 2022 touche à sa fin, quelles conclusions pourriez-vous tirer de votre participation ? Quelles ont été vos grandes satisfactions ? 

C’était un challenge de produire cette saison de Cher futur moi entre deux pays, mais nous y sommes arrivés. Le résultat est à la hauteur de nos espérances. Paradoxalement, il y a une vraie unité à cette saison et cela nous prouve encore plus que les enjeux qui concernent la jeunesse dans le futur traversent les frontières. J’ai pu rencontrer virtuellement de très belles personnes et j’ai maintenant hâte que tout le monde puisse se rencontrer « in real Life » pour la diffusion de l’installation, prévue à partir du 29 octobre 2022 à là Galeria da Boavista à Lisbonne dans le cadre de la clôture de la saison France-Portugal 2022. 

L'Institut français et le projet

 

La nouvelle saison de la web-série Cher futur moi a été réalisée dans le cadre de la Saison France-Portugal 2022, qui est mise en œuvre par I'Institut français pour la partie française. 

En savoir + sur la Saison France-Portugal 2022 

L'institut français, LAB