
Exposition UFA (Université des Futurs Africains) - Le Lieu Unique, Nantes
L'exposition invite une vingtaine d’artistes du continent africain et de sa diaspora qui remontent dans le temps pour déconstruire les clichés sur le rapport de l’Afrique au futur et se demandent de quels savoirs et de quelles histoires nous avons besoin pour comprendre et imaginer les mondes de demain.
Mis à jour le 17/06/2021
10 min
Une enquête critique, une réflexion sur la notion du temps
UFA, l’Université des Futurs Africains se concentre sur la thématique des Futurs de l’Afrique. Quelle place le continent africain a-t-il occupé dans l'élaboration de discours qui se sont présentés comme des récits du futur ? Quels imaginaires de l'Afrique ont été mobilisés ? Que reste-il de l'utopie des futurs non alignés ? Pour explorer ces questions, l'exposition a fait appel à des artistes pour qui il s'agit autant de déconstruire les mythes du futur échafaudés par l’Occident, et souvent exportés vers le continent africain, que de s’attacher à construire ses propres espaces de recherche. Héritier.e.s du panafricanisme et du numérique, adeptes des démarches collectives, ils et elles s’emparent des questions liées aux technologies, aux savoirs, à l’écologie, au soin, aux luttes d’émancipation.
La relecture critique en cours déplace les cadres de réflexion et pourrait aboutir à l’élaboration de nouvelles utopies. Ainsi par exemple, alors que SpaceX lance sa première mission habitée dans l’espace en 2021, comment faire en sorte que les questions spatiales ne soient pas uniquement l’apanage des scientifiques et des entreprises privées ? Comment s’assurer que les dimensions culturelles, spirituelles et sociales indissociables de cette nouvelle quête de l’espace ne soient pas reléguées au second plan, voire ignorées, se demande Tabita Rezaire dans son film Mamelles Ancestrales ? A travers l’installation A Black liberation Zodiac, 12th house: toward a black planetarium, l’artiste Nolan Oswald Dennis explore quant à lui les voies de réappropriation des savoirs astronomiques en s'inspirant des mouvements de libération Noirs ancrés dans la tradition des communs.

L'artiste en histo-futuriste
Les artistes invité.e.s procèdent à la manière d'histo-futuristes. Le terme est emprunté à l’écrivaine de science-fiction africaine-américaine Octavia Estelle Butler. Celle-ci définissait l’histo-futuriste comme « quelqu’un qui regarde vers l’avant sans tourner le dos au passé, combinant un intérêt pour l’humain et pour la technologie ». Ce concept fait écho au manifeste pour une utopie active prôné par l’économiste Felwine Sarr dans son livre Afrotopia. C’est en opérant la rupture avec les modèles de développement inadéquats, en faisant l’archéologie des cultures locales et en créant ses propres métaphores du futur que le continent africain trouvera sa force et contribuera à « porter l’humanité à un autre palier ».
L’exposition est aussi nourrie par la philosophie de Souleymane Bachir Diagne et sa critique du temps que l’on dit africain; par les réflexions du philosophe Valentin-Yves Mudimbe sur l’invention de l’Afrique et par le travail de l’historienne Jenny Andersson sur les recherches sur le futur qui se développent pendant la guerre froide aux États-Unis, en Europe et dans l’URSS, avec en toile de fond l’émergence des revendications et les luttes de libération des pays dits du « Tiers Monde ».

Réinventer les universités
Le titre de l’exposition fait référence à l’Université du Futur Africain (UFA) de Sébikotane, au Sénégal, un des grands chantiers initiés par le président Abdoulaye Wade au milieu des années 2000 et aujourd’hui abandonné. Dans leur projet, L’école des Mutants, les artistes Hamedine Kane et Stéphane Verlet-Bottéro explorent comment plus d’un siècle d’histoire coloniale et postcoloniale a façonné les politiques d’éducation en Afrique de l’Ouest. Ces modèles d’éducation qui n’ont pas tenu leurs promesses nous invitent à réinventer l’idée d’université pour fabriquer de nouveaux outils de compréhension de notre monde en mutation. Au sein de l'exposition, chacune des propositions se construit sur une réflexion sur l’état actuel des connaissances et ouvre des perspectives vers de nouvelles façons de les aborder, de les transmettre ou de les imaginer.

Un lieu utile
Parce que le futur se construit en expérimentant au présent et pour abolir la distance spatio-temporelle entre l’exposition et le continent africain, une structure conçue par les architectes DK Osseo-Asare et Yasmine Abbas est installée au sein de l’exposition. Consacrée à la construction d’un savoir en commun, elle fonctionne comme un lieu utile, un laboratoire, un espace de rencontres. Transformée temporairement en université d’éducation populaire, elle devrait accueillir le projet expérimental d’école du code imaginée par l’artiste-chercheuse sud-africaine Tegan Bristow à partir des traditions de broderies de perles et des tissages de la province du KwaZulu en Afrique du Sud et du Mozambique. A Vernacular Algorithms Researchétudie comment ces objets complexes que sont les broderies de perles, peuvent nous aider à (re)penser et explorer différemment les technologies numériques pour en rouvrir les sens et les potentialités.

Artistes
UFA, Université des Futurs Africains a invité plus d’une vingtaine d’artistes à présenter leurs travaux (installations interactives, expériences de réalité virtuelle, films, sculptures, dessins, créations sonores,...) qui prennent parfois une nouvelle dimension ou ont été créés spécialement pour l’exposition.
Avec :
- DK Osseo Asare & Yasmine Abbas (Ghana / États-Unis / France): https://www.lowdo.net/ | neo-nomad.net | Instagram : @lowdesignoffice | @panurban | @yosseo
- Larry Achiampong (Ghana / Royaume-Uni) : http://www.larryachiampong.co.uk | Instagram : @larryachiampong | Twitter : @blackph03nix
- Jean-Pierre Bekolo (Cameroun) : https://bekolopress.wordpress.com | Instagram : jeanpierrebekolo
- Lo Def Film Factory, Francois Knoetze & Amy-Louise Wilson (Afrique du Sud) : | francoisknoetze.com | Instagram : @lodeffilms | wilsonamylouise | francois.knoetze
- Hamedine Kane & Stéphane Verlet Bottéro (Sénégal / Mauritanie / France) : H Kane : vimeo | http://stephaneverletbottero.info/the-school-of-mutants | Instagram : | theschoolofmutants | hamedine.kane7 | stephane.verlet.bottero
- Tegan Bristow, Nhlanhla Mahlangu, Philisiwe Dube (Afrique du Sud) : teganbristow.co.za | Instagram : dr_tegan
- Russel Hlongwane (Afrique du Sud): Instagram : russel.hlongwane
- Ângelo Lopes & Rita Raínho (Cap-Vert)
- Kapwani Kiwanga (Canada / France) : https://www.kapwanikiwanga.org/ | http://galeriepoggi.com/fr/artistes/oeuvres/12156/kapwani-kiwanga
- Jihan El Tahri (Egypte) : Instagram : jihantahri
- Jean Katambayi Mukendi (République Démocratique du Congo) : | Picha | Galerie : https://www.trampolinegallery.com/jean-katambayi
- Afrotopiques, Marie-Yemta Moussanang (Tchad / France) : soundcloud.com/afrotopiques| | Instagram : afrotopiques_podcast
- Nolan Oswald Dennis (Afrique du Sud) : https://www.nolanoswalddennis.com | Galerie : https://www.goodman-gallery.com/artists/nolan-oswald-dennis | Instagram : data_body
- Tabita Rezaire (Guyane / France / Danemark): Galerie : https://www.goodman-gallery.com/artists/tabita-rezaire | www.tabitarezaire.com/
Commissaire de l’exposition : Oulimata Gueye, Sénégal / France : xamxam.art
Scénographe : Thomas Charil Dejours, France
Graphiste : Emilie Aurat, France
Avec la participation du CNC, DICREAM

L'exposition « UFA (Université des Futurs Africains) » est proposée dans le cadre de la Saison Africa2020.