1 min
Critique de la raison nègre, d'Achille Mbembe
Dans son essai Critique de la raison nègre, le penseur camerounais Achille Mbembe explore les imaginaires contemporains en questionnant la vision européenne du « Nègre », construction historique liée au concept de race.
Penseur du post-colonialisme
Né en 1957 au Cameroun, Achille Mbembe arrive à Paris en 1982 pour poursuivre ses études à l'Université Panthéon-Sorbonne. Docteur en histoire et titulaire d'un DEA en sciences politiques, il publie de nombreux essais sur l'Afrique contemporaine, mêlant histoire, sociologie et philosophie politique (De la postcolonie en 2000 ; Sortir de la grande nuit en 2010 ; Critique de la raison nègre en 2013).
Devenu une figure du post-colonialisme, le penseur camerounais enseigne dans le monde entier, de l'université Columbia de New York à l'université du Witwatersrand de Johannesburg, dont il occupe aujourd'hui les fonctions de directeur de recherche.
Construction moderne du « Nègre »
Historiquement, l'homme noir a été réduit à l'état d'objet pour les besoins d'une marchandisation et d'une domination à l'échelle mondiale. Dans l'imaginaire des sociétés européennes modernes, la figure du « Nègre » a été associée au concept de « race », dans le but de justifier l'exploitation des populations noires. Une exploitation humaine culminant à travers la traite négrière, la colonisation et l’Apartheid.
Dans Critique de la raison nègre, Achille Mbembe interroge les imaginaires européens et propose d'en finir avec les principes de soumission que représentent les fantasmes du « Nègre » et de la « race ».
Lutter contre la raison nègre
Empruntant son titre à l'ouvrage d'Emmanuel Kant, Critique de la raison pure (1781), dans lequel le philosophe allemand analyse les limites de la raison humaine, Achille Mbembe entend ici déconstruire la notion de « race » qui a entraîné tant de catastrophes humaines.
Selon lui, l'homme noir doit se libérer du racisme européen, sans pour autant tomber dans une pensée de la différence identitaire prônée par les penseurs de la « négritude », tels qu’Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor.
Dans le sillage de la pensée post-colonialiste de Frantz Fanon, qui dénonçait l'intériorisation de la « raison nègre », le penseur camerounais poursuit les travaux engagés lors de ses livres précédents, De la postcolonie et Sortir de la grande nuit, dans lesquels il élabore le concept d'« Afropolitanisme », comme prise de conscience d'un métissage identitaire et culturel.
Une perspective mondiale
De l'esclavage en Amérique à la colonisation de l'Afrique, en passant par la politique de ségrégation raciale de l'Apartheid, officiellement abolie en Afrique du Sud en 1991, Achille Mbembe examine les rapports de domination entre le monde occidental et les peuples noirs, tout en rappelant l'effondrement de la suprématie européenne dans le nouvel ordre du monde.
Le penseur camerounais nous invite ainsi à reconsidérer la géographie mondiale, en vue de trouver le chemin d'une humanité commune.
Un projet d'ampleur récompensé en 2013 par le Prix Fetkann dans la catégorie Mémoire, pour sa contribution en faveur des principes républicains et du travail de mémoire des pays du Sud.
Critique de la raison nègre a été traduit en espagnol et en roumain avec le soutien de l'Institut français.
Par ses programmes d'appui à la traduction, l'Institut français participe à la diffusion des sciences humaines de langue française dans le monde entier.
Achille Mbembe est l’un des initiateurs des Ateliers de la pensée de Dakar, devenus un rendez-vous incontournable de la scène intellectuelle africaine, et soutenus par l’Institut français.