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Deleuze, les mouvements aberrants, de David Lapoujade
Etudiant l'ensemble de la philosophie de Gilles Deleuze, David Lapoujade fait des « mouvements aberrants » la question centrale à laquelle l'auteur de Logique du sens aura passé sa vie à répondre.
Un spécialiste du pragmatisme
Né à Paris en 1964, David Lapoujade se spécialise en philosophie et suit notamment l'enseignement de Gilles Deleuze. En 1996, il publie une thèse portant sur le pragmatisme du philosophe américain William James et contribue à l'édition de plusieurs de ses ouvrages : Précis de psychologie (2003) et Philosophie de l'expérience : un univers pluraliste (2007).
Aujourd'hui maître de conférences à l'université Paris I-Panthéon-Sorbonne, David Lapoujade s'intéresse également à l'œuvre du philosophe français Bergson dans Puissances du temps et de Gilles Deleuze : il fait éditer à titre posthume son Île déserte : textes et entretiens 1953-1974 (2002) et Deux régimes de fous (2003), avant de lui consacrer une étude dans Deleuze, les mouvements aberrants (2014).
En 2017, David Lapoujade publie Les Existences moindres, sur l'œuvre d'Etienne Souriau et la question des degrés d'existence des êtres virtuels, notamment les personnages de fiction.
Le problème de Deleuze
Gilles Deleuze a contribué à questionner l'œuvre de nombreux penseurs, parmi lesquels Hume, Nietzsche ou Kant, mais aussi la philosophie elle-même, la littérature (Proust et les signes, 1964), le capitalisme (Mille plateaux, 1980, avec Félix Guattari) ou encore le cinéma (L'Image-mouvement, 1983 ; L'Image-temps, 1985).
Pour David Lapoujade, Deleuze est un philosophe de concepts et de logique, qui étudie pourtant des « mouvements aberrants », échappant a priori à toute rationalité : du naturalisme de Zola qui conduit immanquablement ses personnages à la folie et à la mort au parcours de certains peuples nomades et aux portraits déformés de Francis Bacon. Gilles Deleuze cherche à chaque fois à introduire une logique à ces « mouvements aberrants » – une « logique irrationnelle » selon les mots de David Lapoujade.
Le fondement d'une philosophie
David Lapoujade reconnaît que les « mouvements aberrants » sont un concept qui peut paraître mineur dans l'œuvre de Deleuze, comparé à ses concepts fameux d'immanence et de virtuel. L'expression est d'ailleurs employée tardivement par le philosophe : elle apparaît dans ses réflexions sur le cinéma dans les années 1980.
Néanmoins David Lapoujade estime que les « mouvements aberrants » traversent toute la pensée du philosophe, et en constituent une véritable clé de lecture. Ils sont à l'image des personnages de Melville ou de Dostoïevski : ils poursuivent une logique qui échappe à la raison. Et c'est le devoir du philosophe que de dégager cette logique, malgré son apparente irrationalité.
Un tropisme anglo-saxon
La traduction anglaise de Deleuze, les mouvements aberrants a été publiée en 2017 aux Etats-Unis, berceau de la philosophie pragmatique qui a inspiré Deleuze. Le philosophe avait contribué, à la suite d’Henri Bergson, à faire redécouvrir, au milieu du XXe siècle, ce courant opposé au dogmatisme et fondé sur l’importance des vérifications empiriques, incarné notamment par un William James – étudié par David Lapoujade dans sa thèse.
Si les « mouvements aberrants » de Deleuze sont des manifestations empiriques, elles sont d'abord l'expression d'une « lutte contre la mort », jusqu'à devenir une lutte politique « contre le capitalisme qui nous transforme en morts vivants ».
Deleuze, les mouvements aberrants a été traduit en portugais, espagnol et turc avec le soutien de l'Institut français.
Par ses programmes d'appui à la traduction, l'Institut français participe à la diffusion des sciences humaines de langue française dans le monde entier.