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Voix intérieures, une création d’Yves Mwamba
Voix intérieures est la première création du chorégraphe congolais Yves Mwamba, un spectacle engagé, consacré à la jeunesse congolaise et à ses révoltes. L’œuvre emprunte autant aux codes de la danse krump qu’à l’énergie des marches militantes.
De Kisangani à Avignon
Yves Mwamba est né à Kisangani, sur les rives du fleuve Congo, une ville meurtrie par plusieurs années de conflits et en proie à un instabilité chronique. Dès l’adolescence, il découvre la danse et le hip hop, qu’il pratique au sein d’une association qui organise des battles inspirés par le krump, un style né dans le ghetto de Los Angeles. Sa rencontre avec la danse contemporaine doit beaucoup au chorégraphe Faustin Linyekula, originaire de la même ville, et qui y implante les Studios Kabako, un espace dédié à la formation de danseurs. Yves Mwamba y entame un apprentissage qui va l’amener à rejoindre en 2013 la création Drums and Digging, qui donnera lieu, après une grande première au festival d’Avignon, à une tournée internationale.
L’énergie de la contestation
Voix intérieures est la première pièce d’Yves Mwamba. Elle réunit sur scène trois congolais : un danseur, Yves Mwamba, un musicien, Pytshens Kambilo, et une militante activiste, Rebecca Kabugho. Dans un décor composé de sacs en plastique et de débris, signé par le sculpteur Freddy Tsimba, ce spectacle intense et très politique explore les questions de la censure et de la liberté d’expression. Les gestes, tour à tour frénétiques et syncopés, convoquent l’énergie de la marche militante et la rage de la contestation. « On marche ensemble, explique Yves Mwamba, comme si on était en train de protester dans la rue », au rythme entêtant des boucles de guitare électrique.
La rue en scène
Porté par la compagnie Semena, Voix intérieures est le fruit d’une recherche qui commence en 2017. De retour à Kisangani et à Kinshasa, Yves Mwamba rencontre Luc Nkulula, qui milite au sein de la Lucha, un mouvement citoyen congolais engagé dans la lutte pour plus de justice sociale. Arrêté plusieurs dizaines de fois, avant de finir assassiné, il inspire à Yves Mwamba l’envie de travailler sur la censure et la répression qui frappe une jeunesse congolaise en quête d’un meilleur avenir. Il parvient alors à convaincre Rebecca Kabugho, une militante en laquelle il voit un alter-ego de Luc Nkulula, de monter sur scène. Il souhaite ainsi investir le plateau comme un nouvel espace de contestation : « la scène, déclare-t-il, est un espace qui est tellement vaste qu’il mérite des gens dedans, il n’est pas différent de la rue ».
Un long travail de recherche
Le travail d’Yves Mwamba s’est construit dans un dialogue entre la France et le Congo : « la France m’apporte une liberté de création, déclare-t-il, et le Congo me donne une énergie et une dramaturgie ». Son premier spectacle, Voix intérieures, est né d’une longue série de résidences : au Studio Kabako à Kisangani, aux Ateliers Médicis à Clichy-Montfermeil, et au Carreau du Temple à Paris, entres autres. Cette œuvre chorale réunit des artistes congolais issus de plusieurs disciplines, comme l’écrivain Fiston Mwanza Mujila, qui signe la dramaturgie, ou le sculpteur Freddy Tsimba, qui a créé une scénographie sur mesure.
Lauréat du programme Sur Mesure, Yves Mwamba a effectué une résidence en République démocratique du Congo, durant l'été 2020, autour de son projet Voix intérieures.