Fabienne Azzaro présente le FAIR, un dispositif soutenu par l’Institut français dans le domaine des musiques actuelles
Fabienne Azzaro est administratrice du FAIR, dispositif d’aide au démarrage de carrière en musiques actuelles qui accompagne 14 artistes émergents par an, notamment dans leur première expérience à l’international. Pour ne citer qu’eux, IAM, Philippe Katerine ou encore Christine & the Queens ont pour point commun d’avoir bénéficié de ce dispositif créé en 1989. Le FAIR est soutenu par l’Institut français, qui accompagne certains artistes lauréats à l’étranger.
Mis à jour le 30/05/2022
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Pourriez-vous nous présenter rapidement le FAIR, ses principes et son fonctionnement ?
Le FAIR est le premier dispositif national d’aide au démarrage de carrière et de professionnalisation dans le domaine des musiques actuelles. C’est une association reconnue d’intérêt général qui a été créée il y a plus de trente ans à la demande du Ministère de la Culture. Notre rôle consiste à accompagner des artistes avec un focus sur 6 mois, puis sur une période qui va de dix-huit mois à beaucoup plus en fonction des besoins des artistes.
Les artistes accompagnés par le FAIR sont sélectionnés par un Appel à Candidature. Quels critères le jury prend-t-il en compte ?
Tout se fait en ligne. Pour constituer un dossier, il faut répondre à cinq critères : ne pas avoir de premier titre exploité depuis plus de quatre ans, avoir au minimum cinq concerts à son actif depuis la création du projet, avoir un élément d’encadrement professionnel (label, manager, tourneur, éditeur), être inscrit ou en cours d’inscription à la SACEM, et enfin, que la moitié au moins des membres du groupe résident en France. Sur la base de ces critères une présélection est faite et on rentre ensuite dans le processus de sélection : un comité artistique indépendant écoute deux titres de chacun des candidats. Chaque membre du comité a ensuite pour mission de ne sélectionner qu’un seul artiste qui sera son lauréat, sur le principe du coup de cœur. Ce n’est donc pas le FAIR qui sélectionne directement les artistes, mais un jury paritaire composé de sept professionnels représentatifs de tous les métiers de la profession, qui est d’ailleurs renouvelé à chaque appel. Et c’est ainsi qu’on obtient nos 14 lauréats par an (7 par session avec 2 sessions par an : en février et en septembre).

En quoi consiste ensuite l’accompagnement proposé aux artistes ?
L’accompagnement se fait sur cinq axes. Le premier axe prend la forme d’une bourse, qui est actuellement de 8 000 euros. Il ne s’agit pas d’une subvention, car elle n’est pas versée à l’artiste directement mais vient en remboursement de dépenses. Elle est également conditionnée à une présence en formation. Cette formation, deuxième axe, prend la forme d’un séminaire, en dehors de Paris, et est surtout consacrée à la gestion de carrière. On aborde ainsi avec les musiciens tous les aspects de leur métier : les droits sociaux des artistes, la structuration, les types de contrats, les droits d’auteurs et droits voisins, et enfin la fiscalité. Nous leur proposons également une autre formation sur le corps et la santé du musicien, pour leur permettre de prendre en considération leur principal outil de travail professionnel, et durant laquelle sont abordés la gestion de la fatigue, des déplacements, la posture, etc.
Nous leur proposons aussi des rencontres professionnelles, à la fois avec nos financeurs comme l’Adami ou la SACEM, et avec des partenaires de terrain, comme Ear-Care qui leur offre un moulage de filtres auditifs, et Agi-son qui leur offre un audiogramme pour qu’ils sachent où ils en sont, et pour mieux protéger leur audition. Nous souhaitons ici leur permettre d’identifier tous les acteurs qui peuvent à un moment les aider dans leur projet et leur carrière.
Dans notre axe d’aide à la diffusion, les lauréats ont l’occasion de se produire au Café de la Danse. Cette soirée de showcases donne également lieu à des captations et à des interviews. L’idée étant de produire des contenus vidéos de qualité dans le cadre de notre axe d’aide à la communication, afin qu’ils puissent s’en servir ensuite à leur guise, auprès du public ou des professionnels.
Le dernier et cinquième axe leur apporte enfin une aide stratégique et/ou juridique. Nous réfléchissons avec eux au développement de leur carrière, en tant que partenaire n’ayant pas d’intérêts financiers directs dans leur projet. Le but n’étant bien entendu pas de se substituer à l’entourage des artistes, mais de les accompagner au mieux afin de répondre à leurs doutes et à leurs questions. Sur cet aspect, les artistes peuvent d’ailleurs revenir nous voir après la période d’accompagnement de dix-huit mois, pour nous demander conseil tout au long de leur carrière.

La pandémie a également été l’occasion de développer la captation des concerts. Qu’en est-il de leur diffusion à l’international ?
Comme tout le monde, la pandémie nous a imposé d’arrêter la diffusion en présentiel. Nous avons voulu proposer des captations pour les remplacer, que nous avons finalement continué à réaliser quand les concerts ont repris. C’est un outil qui a pu permettre de garder une certaine forme de visibilité. Aujourd’hui, le but est de fournir aux artistes un contenu de qualité qui leur permet de montrer leur travail notamment sur leurs réseaux sociaux. Les captations servent aussi de carte de visite, en particulier à destination des acteurs du réseau, comme l'Institut français. C’est ce que nous sommes actuellement en train de mettre en place.
Comment votre travail s’articule-t-il avec l’Institut français et le réseau culturel français à l’étranger ces dernières années ?
C’est l’Institut français de Colombie, à Bogota, qui en avait fait la demande, il y a, à peu près 10 ans. Au moment où les lauréats sont sélectionnés, nous transmettons leurs noms au réseau culturel. Ce sont ensuite les programmateurs qui nous envoient leurs demandes. Récemment, par exemple, l’Institut français du Pérou a souhaité inviter le groupe Ottis Cœur. Le FAIR joue alors le rôle d’intermédiaire avec les artistes et leurs entourages. Bien entendu, il faut qu’il y ait du côté des artistes une volonté de se développer à l’international, ce qui est d’ailleurs presque toujours le cas. Une fois l’accord de principe obtenu, ce sont les Instituts qui organisent directement la tournée avec l’entourage du groupe, comme ils le souhaitent.
En quoi est-il important de se projeter sur la scène internationale dès le début de carrière ?
Souvent, pour ces artistes en développement, c’est l’occasion de faire une première expérience à l’international. Il faut qu’ils comprennent qu’à l’international, les choses sont organisées différemment : ce sont d’autres contextes, d’autres conditions d’accueil techniques… C’est aussi se confronter à la barrière de la langue. Même quand on a déjà bien démarré en France, à l’étranger on repart forcément de zéro. C’est donc extrêmement formateur. L’intérêt pour le FAIR, c’est que ces dates à l’étrangers font à nos yeux partie de la formation : cela leur permet de comprendre s’il est vraiment intéressant pour eux de se développer à l’international, et ce que cela implique réellement.

L'Institut français est partenaire du FAIR.
De nombreux artistes lauréats du FAIR collaborent avec le réseau culturel français à l'étranger dans le cadre de tournées à l'étranger.